Amanite tue-mouche : le champignon du père Noël ?

Amanite tue-mouche : le champignon du père Noël ?

Saviez-vous que le père Noël vendait des champignons ? 

Le problème avec ce personnage mythique, c’est qu’il a été instrumentalisé à des fins commerciales. 

Si je vous parle de lui, vous penserez peut-être à un acteur du parc Disneyland ?  

Ou bien à une publicité d’une marque de soda bien connue ? 

Or, saviez-vous que le père Noël était à l’origine un chamane ? Lors de la période de Noël, cet homme partait cueillir un champignon pour ensuite le vendre de villages en villages. 

Ce champignon est omniprésent dans notre culture. Il s’agit de l’amanite muscaria ou amanite tue-mouche, le célèbre champignon de l’univers de Mario.

Mais pourquoi le père Noël utilisait ce champignon spécifiquement ? Vous allez le découvrir au fil de cet article. 

Qu’est-ce que l’amanite tue-mouche ? 

 

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L’amanite tue-mouche est un champignon vénéneux de la famille des amanites (Amanitaceae). Ce champignon pousse dans les forêts et pâturages des régions tempérés de l'hémisphère Nord. Vous le trouverez généralement sous les bouleaux et les sapins.

Vous pouvez identifier ce champignon à sa couleur rouge à pois blancs. 

Comme la plupart des amanites, ce champignon a des spores blancs, des lames libres, un anneau sur la tige, ainsi qu’une volve. 

Attention, car ce champignon est vénéneux. Sa consommation provoque des hallucinations

D’où vient le nom du champignon ? 

Le nom d’amanite tue-mouche fait référence à ses qualités intoxicantes. 

Autrefois, en Europe, ce champignon servait d’insecticide. Il était d’abord découpé en morceaux. Puis, on le trempait dans du lait pour attirer les mouches et les empoisonner. Cela a longtemps été l’explication du nom attribué au champignon. 

Toutefois, des études ont finalement révélé que ce procédé ne tuait pas les mouches mais les endormait. 

L’amanite tue-mouche est-elle mortelle ?

 

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L’amanite tue-mouche n’est pas un champignon mortel. 

Elle se distingue donc d’autres espèces d’amanites réellement mortelles que l’on appelle les “Anges destructeurs” comme par exemple l'amanite phalloïde ou l’amanite panthère. Les Anges destructeurs sont des champignons qui sécrètent des amatoxines mortelles, des composés hautement toxiques qui détruisent le foie. 

Si l’amanite tue-mouche n’est pas mortelle, elle n’est pas inoffensive pour autant. En effet, cette espèce provoque des hallucinations qui peuvent entraîner des comportements à risque et des troubles mentaux. 

En raison de sa toxicité, ce champignon s’apparente à une drogue. Et comme toute drogue, sa consommation est potentiellement dangereuse

Quels sont les effets de l’amanite tue-mouche ?

La consommation de l'amanite tue-mouche provoque des effets neuropsychiques qui peuvent varier selon les personnes. 

D’après les témoignages, les effets surviennent dans les 30 minutes à 2 heures suivant l'ingestion, même avec un quantité aussi faible que 5 grammes. Ces effets peuvent inclure des somnolences, nausées, vomissements, ou des états d’euphorie, des vertiges ou des convulsions qui peuvent durer entre 4 et 10 heures. Les effets hallucinogènes sont souvent suivis d’une phase de déprime ou “descente”.   

D’après cet article de chercheurs Suisses, ces effets proviennent de la présence dans le champignon de substances actives : l'acide iboténique, le muscimole et la muscazone

L'acide iboténique est une substance hallucinogène et un excitant du cerveau. Cette toxine se transforme ensuite en un alcaloïde psychoactif : le muscimole. Cette substance a des effets hallucinogènes qui sont cinq à six fois plus importants que la précédente ainsi qu’une action inhibitrice du système nerveux. Le muscimole produit ensuite la muscazone, une autre toxique qui cause de la somnolence, de la confusion et de la nervosité. 

L’amanite tue-mouche dans le chamanisme nordique

 

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Les premiers peuples chamaniques ont utilisé les psychédéliques, y compris certains champignons comme l'amanite tue-mouche. D’après cet article de Didier Michelot, éminent biochimiste et chercheur au CNRS, la consommation de ce champignon dans les temps anciens est associée au mysticisme.  

Ce champignon serait même à l’origine de l'émergence du mythe de Noël. 

L'histoire de Santa Claus daterait en réalité d’il y a 8 à 10 000 ans. Elle viendrait d’un ancien peuple indidène du nord de l’Europe connu pour élever des rennes : les samis.

Les samis croyaient aux esprits et à la vie après la mort. 

Selon leurs croyances, le monde se partageait en 3 parties distinctes : 

  • Le monde supérieur, habité par les dieux ; 
  • Le monde tangible, habité par les mortels ;
  • Le monde inférieur, celui des morts. 

Afin de parler avec le monde inférieur, les samis tenaient des cérémonies en hiver. 

Le personnage de Santa Claus était en réalité un chamane de la tribu, à la fois guérisseur, prêtre, et messager.

En automne, Santa Claus partait cueillir des amanites tue-mouche.

Il trouvait ce champignon sous un conifère bien connu des forêts du nord de l’Europe : l’épicéa.

Cependant en raison de la teneur en eau de ces champignons, le chamane devait les faire sécher pour pouvoir les consommer. 

Pour cela, le chamane faisait sécher ces champignons à la lumière du soleil en les accrochant aux branches de l'arbre.

Et lors du solstice d’hiver, il faisait des tournées de tribus en tribus pour initier les hommes aux vérités du monde grâce à ce champignon. L’amanite tue-mouche avait donc des propriétés enthéogènes comme la psilocybine. 

Le champignon enthéogène de l’Inde védique 

Un enthéogène est une substance qui fait naître le sentiment du divin en soi. De nombreuses proto-religions utilisaient ce type de substances lors de cérémonies religieuses. 

Selon cet article sur les travaux du mycologue américain Gordon Wasson, l’amanite tue-mouche servait aussi à la préparation d’une liqueur rituelle de l’Inde ancienne : le soma. Cette boisson hallucinogène est mentionnée dans le Rig-Veda, un des grands textes sacrés de l'hindouisme.

Selon Gordon Wasson, ce champignon aurait également joué un rôle dans un culte à mystère de la Grèce antique : les Mystères d'Éleusis. Il aurait pu faire partie des ingrédients d’un breuvage rituel mentionné dans l'Odyssée d’Homère : le Kykeōn.

L’amanite tue-mouche chez les vikings

Ce champignon était aussi consommé par un groupe de guerriers chez les vikings : les berserkers. En effet, l’ethnobotaniste Karsten Fatur de l’Université de Ljubljana  affirme que les guerriers berserkers consommaient l’amanite tue-mouche comme de la potion magique afin de se transcender lors des combats. 

Cette thèse est appuyée notamment par le dessin animé japonais de Vinland Saga qui retrace l'épopée viking et les conquêtes nordiques des Danois sur l'Angleterre. Lors d’une scène, un personnage consomme une amanite tue-mouche qui le fait entrer dans une rage de manière quasi-instantanée.

Le grand mycologue américain, Paul Stamets, appuie cette hypothèse dans cet article. Il affirme que la consommation de ce champignon avait provoqué chez lui un comportement frénétique. Cela pourrait expliquer la fureur sacrée des guerriers berserkers. 

D’autres sources affirment que la potion magique des vikings était la jusquiame noire, une plante proche de la belladone. 

Toutefois, rappelons ici qu’il s’agit de spéculations pour lesquelles nous n’avons pas de véritables preuves scientifiques.

Conclusion 

L’amanite tue-mouche serait donc peut-être à l’origine du mythe de Noël. On la retrouve dans les traditions chamaniques des peuples autochtones d’Europe du Nord. 

Bien que non-mortel, ce champignon est toxique. Il provoque des hallucinations qui proviennent de ses substances actives : l'acide iboténique, le muscimole et la muscazone. 

C’est probablement pour ces effets que ce champignon se consommait lors de cérémonies initiatiques dans l’Antiquité. 

Rappelons toutefois que ce champignon étant toxique, sa consommation est potentiellement dangereuse.


Sources et références

Michelot D, Melendez-Howell LM. Amanita muscaria: chemistry, biology, toxicology, and ethnomycology. Mycol Res. 2003 Feb;107(Pt 2):131-46. doi: 10.1017/s0953756203007305. PMID: 12747324.

Rampolli FI, Kamler P, Carnevale Carlino C, Bedussi F. The Deceptive Mushroom: Accidental Amanita muscaria Poisoning. Eur J Case Rep Intern Med. 2021 Feb 2;8(3):002212. doi: 10.12890/2021_002212. PMID: 33768066; PMCID: PMC7977045.

https://paulstamets.com/news/viking-swords-amanita-handles

Bareau André. R. G. Wasson. Soma, Divine Mushroom of Immortality. In: Revue de l'histoire des religions, tome 177, n°2, 1970. p. 236.

Navet Éric. Les Ojibway et l'Amanite tue-mouche (Amanita muscaria). Pour une ethnomycologie des Indiens d'Amérique du Nord. In: Journal de la Société des Américanistes. Tome 74, 1988. pp. 163-180.

Fatur K. Sagas of the Solanaceae: Speculative ethnobotanical perspectives on the Norse berserkers. J Ethnopharmacol. 2019 Nov 15;244:112151. doi: 10.1016/j.jep.2019.112151. Epub 2019 Aug 9. PMID: 31404578.

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