Connaissez-vous le “champignon de l’apocalypse” ?
Ce champignon japonais à une réputation de dur à cuire. Il aurait notamment survécu aux heures les plus sombres de l’histoire du XXème siècle.
Ce champignon japonais est un délicieux comestible au parfum de pin, de poivre et de cannelle.
Il serait aussi un trésor anti-âge pour la peau et le cerveau.
Il s’agit du très précieux matsutaké que je vous propose de découvrir dans cet article.
Qu’est-ce que le matsutaké ?

Le matsutaké ou tricholoma matsutake est un champignon sauvage de renommée mondiale. Son nom, qui nous vient du japonais, signifie “champignon du pin”.
Il est particulièrement prisé dans la cuisine japonaise où il accompagne le riz, les soupes et certains plats typiques.
Véritable star locale, il porte au Japon le nom de “roi des champignons”.
Ses grandes qualités gastronomiques lui ont donné une place très spéciale dans la culture japonaise. En effet, le matsutaké était notamment réservé aux hauts dignitaires. Il participait à la célébration de rituels de passage des saisons. Il tient aussi une place particulière dans la poésie japonaise qui fait l’éloge de ses « parfums d’automne ».
Le matsutaké serait aussi l’un des champignons les plus chers au monde. Son prix peut dépasser celui de la truffe du Périgord et de la truffe du Piémont pour atteindre jusqu’à 2 000 $/kg.
Ce champignon est aussi associé à une étrange histoire. Il serait le “champignon de la fin du monde”.
Un champignon pour la fin du monde ?
Le matsutaké est le sujet du livre de l’anthropologue Anna Tsing : “Le champignon de la fin du monde”.
Dans ce livre, Anna Tsing raconte que le matsutaké serait la première créature vivante à avoir émergé sur le sol d’Hiroshima, dévasté par la bombe atomique. L’auteur prend alors ce champignon japonais comme figure d’inspiration pour vivre dans un monde post-apocalyptique.
Anna Tsing, au travers de la catastrophe d’Hiroshima, nous amène à prendre conscience de la précarité de la vie sur terre.
Les champignons dont elle fait l’éloge, seraient un beau témoin de cette vie terrestre, à la fois précaire, imprévisible et sauvage. Ils seraient des organismes capables d’échapper à la volonté de contrôle de l’esprit humain.
L’auteur prolonge sa réflexion dans un critique marxiste du monde capitaliste dans lequel les biens et les êtres sont transformés en ressources interchangeables. Le problème de cet écueil du capitalisme est qu’il a des effets destructeurs sur les écosystèmes et la vie humaine.
Comment libérer les êtres de cette aliénation pour laisser à nouveau fleurir la vie ? L’auteur prône une vision de la vie faite d’enchevêtrements. Les êtres ne sont plus séparés. Ils sont à l’image des matsutakés, reliés par un fil invisible, et évoluent vers une destinée commune.
Des truffes japonaises menacées d’extinction ?

Depuis juillet 2020, le matsutaké est inscrit dans la liste des espèces végétales en voie de disparition par l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN) .
Les matsutakés sont pour les japonais ce que les truffes sont pour les français. Très recherchés pour leur saveur raffinée, le prix de ces champignons peut atteindre des hauteurs vertigineuses.
Avec un prix de vente pouvant atteindre jusqu’à 2 000 $/kg, ce champignon a fait naître des vocations. De nombreux chasseurs de champignons sauvages se sont lancés dans la cueillette du « champignon du pin ».
Or le matsutaké est aujourd’hui victime de son succès.
La hausse de la demande de ce champignon au niveau mondial s’est développée parallèlement à une destruction de son habitat naturel.
Les forêts de pin de l’Oregon où pousse le matsutaké sont menacées par l’industrie du bois. De même en Laponie, dans le Yunnan ainsi que dans l’archipel nippon, l’habitat écologique du champignon japonais est en péril.
Malheureusement, les découvertes scientifiques sur les vertus anti-âge du matsutaké n’arrangent pas les choses.
Les bienfaits du matsutaké
Des scientifiques affirment que le matsutaké présenterait des vertus anti-âge pour la peau et le cerveau.
Selon une étude chinoise de 2012, le matsutaké aurait permis de faire reculer l’âge cérébral de souris âgées.
Dans cette étude, 50 souris ont été isolées en 5 groupes. Et après 6 semaines, les capacités d’apprentissage et de mémoire des souris ont été améliorées.
Selon les conclusions de cette étude, les vertus anti-âge du matsutaké proviendraient des polysaccharides grâce à leur action immuno-stimulante et antioxydante.
Par ailleurs, un étude coréenne de 2014 a mis en évidence certains bienfaits du matsutaké pour la peau. En effet, selon cette étude, le champignon permettrait d’améliorer l’élasticité de la peau. Ces résultats ont alors conduit de nombreuses entreprises cosmétiques à développer des crèmes et sérums à partir de ce champignon.
Faire pousser des matsutakés sur votre pelouse
Pourra-t-on continuer de profiter des trésors du matsutaké ?
Comme le montre Anna Tsing dans son livre, les matsutakés sont à l’image du monde : à la fois fragiles et précaires.
L’habitat naturel du champignon se dégrade dans le monde entier. Et sa cueillette intensive fait augmenter le risque d’une extinction de cette espèce.
De plus, les amateurs de ce champignon sont confrontés à une difficulté majeure. Jusqu’à ce jour, personne n’a réussi à cultiver ce champignon en laboratoire.
Comment préserver la survie de ce merveilleux champignon ?
Le matsutaké se développe habituellement en symbiose avec le pin rouge du Japon.
Avez-vous un jour rêvé d’apporter une touche japonaise à votre jardin ?
Cela peut être l’occasion de faire d’une pierre deux coups.
Il vous suffirait de semer des spores de champignons près de votre arbre japonais. Et peut-être que vous vous réveillerez un jour avec une mini forêt de matsutakés dans votre jardin ?
Sources et références :
Liu H. Wang H. Wang H. Zhang H. Zhang, 2012, Anti-aging effect of polysaccharide from tricholoma matsutake on D-galactose-induced aging mice
So Young Kim, Kyung Chan Go, Yi Seop Song, Yeon Su Jeong, Eun Joo Kim, Beom Joon Kim, 2014, Extract of the mycelium of T. matsutake inhibits elastase activity and TPA-induced MMP-1 expression in human fibroblasts
Anna Lowenhaupt Tsing, 2015, Le champignon de la fin du monde, sur la possibilité de vivre dans les ruines du capitalisme